Partie 2/3 :

Des dagues ? C'est ainsi qu'il nommait ses jian's, des dagues ? Si tout ce qui avait du tranchant et une pointe en était, alors soit. Mi-Yi était prête à accepter beaucoup de choses de la part de Simba, surtout après les méfaits qu'elle perpétra à son encontre. En revanche, la guerrière était peu disposée à se faire houspiller pour le résultat d'une guerre qui n'était point sienne. Là où normalement une tête aurait volé, une expression réprobatrice naquit sur ses traits. L'ancienne Sakung avait bien compris que l'Esprit avait grand besoin de vider son sac. Et quand il en eut fini, celle-ci le laissa filer sans chercher à lui faire obstacle. Non pas que Mi-Yi craignait un quelconque courroux de sa part, mais elle ne se voyait guère philosopher sur la véracité des propos du lion. En tout cas pas au milieu de ce chaos putride, et encore moins ainsi vêtue ! On pouvait bien sûr s'interroger sur les raisons qui la poussèrent au silence. Mais la Revenante savait que seule une longue, très longue discussion serait à même d'extirper Simba de sa torpeur. Et encore... tout était si relatif. Après tout, qu'est-ce qui prouvait que son monde appartenait au réel et le sien à l'immatériel ? Le contraire pouvait tout aussi être vrai. En somme, pour Mi-Yi, les croyances de chacun étaient aussi fortes et sincères que pouvait l'être un adepte envers sa religion. Or, exiger d'un fidèle à croire à autre chose que ce en quoi il avait foi, relevait de l'échec pur et simple. Lorsque l'occasion s'y prêtera, l'ancienne Sakung se promit de parler d'Astrune à Simba, tout en espérant naïvement que celui-ci en ferait autant pour la Rashemanie.


Ce qu'elle souhaitait faire, lui demandait sa Maîtresse. Phyrra n'en n'avait pas la plus petite idée. Toute sa vie, ou dira t-on plutôt ; sa non-vie, n'était que mensonge. Ses souvenirs, son but, son apparente perfection... une farandole d'artifices dont l'issue se résumerait à la protection d'un être parfaitement apte à s'en passer ? La Drow était plus que dubitative face aux propos de Cymetia. Et alors que l'acupunctrice, manifestement cloisonnée dans son rôle d'enfant, tournait l'évènement en dérision. Phyrra se demandait si elle avait même un semblant d'avenir maintenant que le pire était passé. En tant que Revenante, donc immortelle, ses pouvoirs et son savoir-faire se cantonneraient au devoir de nurse ? Bien qu'aucune réponse ne s'en venait éclairer cette question au sein de son esprit, la Drow demeurait certaine qu'elle ne pourrait se satisfaire d'une existence aussi limitée. Si vraiment elle était promise à subsister, Phyrra aurait alors besoin d'une responsabilité autrement plus impactante que celle qui consistait à faciliter la vie de sa Maîtresse. On ne pouvait mettre en cage une conscience aussi forte que celle-ci maintenant qu'on lui assurait l'accès au chapitre suivant...

Morose et muette, Phyrra reporta son attention sur Cymetia qui ne cessait de faire bloc devant la Matriarche. L'une et l'autre se dévisageaient avec insistance. Et bien qu'aucun mot ne fut prononcé après que l'acupunctrice eut prodigué ses conseils, la Drow devina une menace. Rien à voir avec le spectacle que leur avait offert la réincarnée lors de son arrivée. Cette fois l'impression était indistincte, à la limite de l'imperceptible, et pourtant si transcendante... Dans la crainte qu'un malheur ne survienne, Phyrra s'approcha discrètement. Cette constance qu'elle éprouvait ne lui rappelait rien de ce qu'elle avait pu connaître ou imaginer, et à mesure que le temps s'écoulait, une aura sépulcrale se dessina au-dessus des deux protagonistes. Naturellement, la Drow chercha à comprendre le pourquoi de cette manifestation, car à moins que Cymetia ne l'ait doté d'une certaine forme d'empathie, Phyrra n'avait aucune raison de ressentir ce qu'elle ressentait !


L'appréhension de la Drow prit forme dès l'instant où un voile obscur tomba sur le visage de la Matriarche. Avalés par un vide profond et immuable, ses iris chatoyantes disparurent, desquels une nébulosité plus sinistre encore s'échappa ! Phyrra se précipita aussitôt avec la ferme intention de faire rempart entre sa Reine et cet énième danger, mais il était déjà trop tard... La créature s'était saisie de la main de Cymetia, celle-là même qui lui avait offert le ruban. Un sourire patibulaire prit finalement place sur ses lèvres quand une force invisible stoppa violemment l'élan de Phyrra ! À son contact, l'avant-bras de la petite Reine se désagrégea entièrement. Mut par un instinct qui lui était propre, la Revenante réagit promptement en faisant s'agiter chacun des membres qui composaient le sol de son cimetière. Se faisant, Simba fut le premier à se faire immobiliser avant de littéralement disparaître sous la surface du charnier ! Suivit de près par Phyrra puis Éris. Ils auraient beau s'en défendre, nuls ne pouvaient s'y soustraire. La prévoyance dont était capable Cymetia dépassait de très loin le commun des Mortels, comme le fait de prévoir l'imprévu par exemple. Cependant, y faire face ne signifiait point triompher...

Entrainés dans les profondeurs de la terre par les courants putrides, les deux Revenantes et l'Hybride se mélangèrent. Tournoyant sur eux-mêmes, s'entrechoquant, les corps malmenés par cette multitude d'abattis finirent par s'écraser sur un parterre de dalles. Le plafond qui fut témoin de leur passage se referma tel un sphincter, abandonnant ainsi ses rejets à la solitude d'une crypte familière pour l'unes, inconnue pour l'autre. Tandis que plusieurs mètres au-dessus, en surface, Cymetia conjurait de nouveau l'eldakka ! Mais le sortilège expira avant même que son flux ne se matérialise... Les mots que formula la Matriarche en réponse à cet échec termina de convaincre la petite Reine. Désormais forte de ce savoir, la Revenante dépouillé d'une partie de son bras droit se laissa happer par un de ces trous d'énergies. Ainsi put-elle rejoindre ses convives avant que la confrontation ne s'achève.

[OUT : Dans la crypte ~ICI~...]